Covid-19 : Vincent Pavan dénonce deux ans de fraudes scientifiques

Invité par l’association L’union fait la force 88, le chercheur et mathématicien Vincent Pavan* a donné une conférence à Épinal : « Covid-19 : corruptions mathématique et épidémiologique ». Un décorticage en règle des fraudes scientifiques de la crise.

Par Alix Jouan

Vincent Pavan, chercheur et mathématicien (DR)
Vincent Pavan, chercheur et mathématicien (DR)

« On peut débattre de tout, sauf des chiffres » affirmait de manière péremptoire la publicité gouvernementale de l’été 2021. Mais Vincent Pavan n’est pas du tout de cet avis. Ce chercheur en mathématiques est même bien placé pour savoir qu’on peut faire dire ce que l’on veut aux chiffres, surtout si on les bidouille un peu, voire beaucoup. Il l’a clairement démontré lors de sa conférence à Épinal : « Covid-19 : corruptions mathématique et épidémiologique ». Une synthèse percutante de ce qu’il dénonce être deux ans de fraudes scientifiques.

Des simulations délirantes

Pour commencer, revenons en arrière. Nous sommes en 2009 et on nous annonce la pandémie de grippe H1N1. « C’était la répétition générale du Covid, nous dit Vincent Pavan. Tous les ingrédients étaient déjà là, avec une exagération totale de la dangerosité du virus, établie sur la base de simulations délirantes annonçant des millions de morts ». Ces projections sont avant tout le fait d’un certain Neil Ferguson, épidémiologiste à l’Imperial College de Londres, déjà connu pour avoir annoncé une mortalité largement surévaluée lors de la grippe aviaire de 2005 [1].
En France, le même type de modèle mathématique est utilisé à l’époque par l’Institut de veille sanitaire et l’Inserm, ou par l’Ecole des hautes études en santé publique. Les chiffres produits sont tellement hors sol que la commission d’enquête du Sénat sur la gestion de la pandémie de H1N1 notera dans son excellent rapport de 2010 que « l’absence de corrélation entre les estimations modélisées et la réalité constatée est frappante » et que « les hypothèses formulées sur la base des modèles n’ont pas de valeur prédictive ». Bref, du « bullshit » scientifique. L’affaire semble entendue.

Mais en 2020, re-belote. Neil Ferguson et ses simulations sont de retour pour nous annoncer à nouveau des millions de morts, dont 500 000 pour la France. « En fait, il a modélisé à partir d’un vieux code de 2006 vaguement réadapté, commente Vincent Pavan, et il a rédigé un rapport, le « Rapport 9 », qui n’est pas un article scientifique relu par les pairs, mais juste un document de l’Imperial College ». Et notre mathématicien de nous expliquer que ce code contient tellement de paramètres d’entrée (930 au total) qu’on peut lui faire dire tout et n’importe quoi. En statistique, on parle de « surajustement » ou de « surinterprétation » : plus un modèle contient de paramètres, moins il est capable de généraliser et de prévoir de manière fiable.

Des biais de départ

De plus, les mathématiques ont leur limite : « Elles sont assez tautologiques et servent surtout à démontrer qu’un animal à quatre pattes est un quadrupède, explique le conférencier. Autrement dit, le résultat des formules à l’arrivée dépend des données qu’on entre dans les formules au départ ». Toute hypothèse omise ou écartée d’emblée sera donc absente du résultat final, forcément biaisé. Par exemple, pour les modélisations de 2009, le rapport du Sénat souligne qu’à aucun moment « il n’a pas été envisagé que le virus A (H1N1) puisse être moins virulent que celui de la grippe saisonnière ». Interpellant…
De la même façon, en 2020, Ferguson part du principe que le seul moyen de freiner ou de stopper l’épidémie de Covid-19 est de mettre en place des interventions non pharmaceutiques (isolement, quarantaine, mesures de distanciation sociale…) en attendant l’arrivée d’un vaccin. Bizarrement, aucun traitement n’est envisagé. Et, encore plus bizarrement, l’arrivée inéluctable du vaccin sauveur est prévue 18 mois plus tard. « Comment le sait-il ? » s’étonne Vincent Pavan, alors que la mise au point d’un vaccin demande généralement une dizaine d’années.

Des commandes plus que de la science

C’est alors qu’un autre acteur entre sur la scène française : Simon Cauchemez. Membre du fameux conseil scientifique devant éclairer les décisions de nos dirigeants, celui-ci est un élève de Ferguson embauché en 2013 à l’Institut Pasteur pour y fonder l’Unité de modélisation mathématique des maladies infectieuses. Dans un avis du conseil scientifique du 12 mars 2020, Simon Cauchemez cautionne les simulations de son maître et reprend les recommandations du Rapport 9, à savoir une série de mesures barrière et une alternance de périodes de confinement et de déconfinement dans l’attente d’un vaccin. Ce qui sera fait.
Dans la foulée, Simon Cauchemez est missionné pour montrer l’efficacité du confinement. Soyons clair : « Il s’agit d’une commande, ce n’est pas de la science », souligne notre chercheur. Commande exécutée dès mai 2020 avec une première étude publiée dans Science et co-signée par Cauchemez. Vincent Pavan la démolit en deux phrases : « Cet article est l’une des plus grandes arnaques scientifiques du XXIe siècle. Il contient quasiment une faute mathématique à chaque ligne ». Diantre ! De plus, les auteurs s’appuient sur la théorie du R0 (taux de reproduction de base de la maladie), elle-même issue de la théorie de Kermack et McKendrick datant de 1927. Des théories qui simplifient la réalité et ne tiennent pas compte de la diversité humaine, notamment de l’existence de super-contaminateurs, qui finira cependant par être admise plus tard au cours de la crise.
Sans doute pour achever la commande, Cauchemez signera un autre article publié en septembre 2020 dans The Lancet. Celui-ci conclura sans surprise à la réussite des mesures de confinement en France.

La « chimère » de l’immunité collective

En octobre 2020, Simon Cauchemez et Arnaud Fontanet (un autre épidémiologiste membre du conseil scientifique et de l’Institut Pasteur) publient dans Nature un article sur l’immunité collective à atteindre pour contrôler l’épidémie de Covid-19. Pour Vincent Pavan, l’immunité collective n’est ni plus ni moins qu’une « chimère scientifique ». D’ailleurs, les deux auteurs s’appuient encore une fois sur la théorie discutable du R0 et « procèdent à des calculs en apparence compliqués, mais qui se résument finalement à une règle de 3 » pour estimer le pourcentage d’immunité collective à atteindre afin de stopper la propagation de la maladie, « et ce, sans tenir compte de la faible contagiosité du Sars-CoV-2 ni de sa très faible létalité ». Mais surtout, ils promeuvent la vaccination comme moyen le plus sûr pour parvenir à un seuil efficace d’immunité collective, à condition qu’au moins 70% de la population soient vaccinés deux doses. Une assertion qui servira à justifier toute la politique vaccinale de masse mise en place par la suite. Dans la réalité, ce taux de vaccination sera atteint en France en septembre 2021, avec absolument aucun effet. On sait depuis que le vaccin n’empêche pas la transmission et que son efficacité est très relative, ce qui n’a jamais été envisagé par les auteurs. Entre la théorie et la réalité, il y a un gouffre.

Un sondage à la place d’une étude scientifique

Autre exemple de fraude scientifique pointé par Pavan : l’étude ComCor de Fontanet et al. , qui a servi à justifier, après coup (!!!), la fermeture des bars et des restaurants en France. Difficile de ne pas y voir une commande du gouvernement, à qui les cafetiers et les restaurateurs demandaient depuis des semaines sur quelles preuves scientifiques il avait pris sa décision. En fait d’étude scientifique, il s’agit plutôt d’un sondage réalisé en partenariat avec la Cnam et l’Institut Ipsos sur les habitudes de vie des Français, avec une cohorte de malades du Covid et une cohorte de non malades. A partir de leurs réponses, l’étude tente de déterminer les lieux de vie les plus propices à la contamination. Une méthode assez peu scientifique en soi : pourquoi ne pas avoir plutôt effectué des prélèvements microbiologiques sur le terrain ? Qui plus est, Vincent Pavan a relevé des contradictions dans les chiffres présentés, amenant à des aberrations. Le mathématicien s’est fendu d’une contre-expertise restée sans réponse, mais qui a de toute évidence été prise en compte par les auteurs, puisque la version de l’étude publiée dans The Lancet en juin 2021 ne contient plus les chiffres contradictoires. Seulement, impossible d’accéder à l’ensemble des données de l’étude pour vérifier les calculs… L’association Réinfo Liberté, présidée par Vincent Pavan, et l’association Bon Sens finiront par déposer une plainte pénale contre X pour faux et usage de faux, escroquerie et trafic d’influence.

Une pré-publication invérifiable

Idem pour la pré-publication signée Bosetti et al. (et dans laquelle on retrouve Cauchemez et Fontanet) mise en ligne le 28 juin 2021 sur le site de l’Institut Pasteur. Sur la base d’un soi-disant modèle mathématique, celle-ci montre que les non vaccinés seraient 12 fois plus contagieux que les vaccinés. Bien que non relue par les pairs (et elle ne le sera jamais), cette pré-publication servira pourtant de caution scientifique au gouvernement pour mettre en place le pass sanitaire dès le mois suivant. Or, rien ne tient debout dans cette étude, nous dit en substance Vincent Pavan, qui l’avait torpillée dès le 22 juillet 2021 lors de la réunion publique n°15 du Conseil scientifique indépendant. « Les conclusions ne font que confirmer les hypothèses de départ, les équations sont illisibles avec des erreurs typographiques et des termes manquants, de plus on y compare des choux et des carottes, et il est impossible d’accéder aux codes utilisés pour les vérifier ». Comment faire pire ?

Encore une fois, la critique de notre empêcheur de tourner en rond semble avoir été en partie entendue, puisqu’une deuxième version de l’article sera mise en ligne le 6 septembre 2021 avec une légère modification : les non vaccinés n’y sont plus que 4 fois plus contagieux que les vaccinés. Mais comment les auteurs arrivent-ils à ce nouveau résultat ? On ne le sait pas plus qu’avec la première version. Nouvelle plainte contre X déposée par Réinfo Liberté auprès du Parquet de Paris. Les deux affaires, défendue par Me Ludovic Heringuez, sont toujours en cours. Mais un problème apparaît : la justice est-elle en capacité de trancher sur des questions qui relèvent au fond du débat scientifique ?

* Vincent Pavan est maître de conférences et chercheur en mathématiques à l’université d’Aix-Marseille, département Polytech. Il est également membre du Conseil scientifique indépendant, président de l’association Réinfo Liberté et co-auteur avec Ariane Bilheran du livre « Le débat interdit – Langage, Covid et totalitarisme » (2022, Guy Trédaniel Editeur).

[1] Neil Ferguson prédisait jusqu’à 200 millions de morts dans le monde pour la grippe aviaire H5N1 lors d’une interview accordée au Guardian en août 2005